DR. Moaad AGUEZNAI

Cardiologie médicale
Cathétérisme cardiaque.
Diplômée de la faculté de médecine de Caen, France

LES TROUBLES DU RYTHME CARDIAQUE

 Les troubles du rythme du cœur, ou « arythmies cardiaques », se caractérisent par l'existence de battements irréguliers, trop lents ou trop rapides, sans que ces modifications du rythme soient liées à une cause dite « physiologique » (par exemple, un effort physique). De gravité variable, ils sont fréquents, en particulier chez les personnes âgées. Des traitements existent pour éviter que ces arythmies gênent la vie quotidienne ou entraînent de graves complications. QU’APPELLE-T-ON TROUBLES DU RYTHME CARDIAQUE ? arythmie Les troubles du rythme du cœur sont définis par l'existence de battements irréguliers, trop lents ou trop rapides, sans que cela soit lié à une cause physiologique. Ils peuvent survenir occasionnellement ou fréquemment, pour une durée allant de quelques secondes à plusieurs mois, voire toute la vie. Ils sont fréquents chez les personnes âgées. Il en existe une grande variété et la plupart d’entre eux sont sans gravité. Cependant, certains d’entre eux sont invalidants, voire graves, et peuvent mettre la vie du patient en danger.

COMMENT LE CŒUR SE CONTRACTE-T-IL ? Le cœur est un muscle creux composé de quatre cavités : les oreillettes gauche et droite, et les ventricules gauche et droit. Ses parois se contractent rythmiquement pour faire circuler le sang dans le corps, comme le ferait une pompe. UNE ACTIVITÉ ÉLECTRIQUE QUI SE PROPAGE Les contractions du muscle cardiaque se font sous l’action d’un influx électrique qui naît dans une zone située en haut de l’oreillette droite, appelée nœud sinusal (également nœud sino-atrial, sino-auriculaire ou de Keith & Flack). Spontanément, le nœud sinusal produit des décharges électriques, environ 100 par minute. Son activité électrique est contrôlée par un nerf, le nerf vagal, qui tend à la ralentir et à la stabiliser autour de 70 décharges par minute (au repos). L’activité électrique née du nœud sinusal et contrôlée par le nerf vagal est responsable de la contraction des oreillettes qui envoient ainsi le sang qu’elles contiennent dans les ventricules. Mais cette activité électrique ne s’arrête pas dans les oreillettes. Elle chemine vers la partie basse du cœur jusqu’à une autre zone située entre les oreillettes (nœud atrioventriculaire ou auriculo-ventriculaire ou de Atchoff-Tawara). Depuis ce nœud, l’activité électrique se propage dans les ventricules le long de fibres dites « de conduction » (ou « faisceau de His ») organisées en deux branches, l’une pour le ventricule gauche, l’autre pour le ventricule droit. Lorsque l’activité électrique parvient aux ventricules, ceux-ci se contractent et expulsent le sang qu’ils contiennent vers l’aorte (ventricule gauche) ou l’artère pulmonaire (ventricule droit). C’est à ce moment que l’on ressent le pouls. Les troubles du rythme cardiaques sont classés selon leur effet sur les battements du cœur (accélération, ralentissement, irrégularité) et selon la zone du cœur qu’ils affectent : oreillettes, ventricules ou zones de jonction entre les deux.


QUEL EST LE RYTHME NORMAL DU CŒUR ? Au repos, le cœur bat au rythme de 60 à 100 battements par minute chez les adultes et les enfants, et de 90 à 120 battements par minute chez un nourrisson. Certaines personnes ont un rythme cardiaque au repos inférieur à 60 battements par minute (par exemple, les athlètes d’endurance) sans que cela gêne leur vie quotidienne. Au cours d’un effort physique, le système nerveux déclenche une accélération du rythme cardiaque afin que le débit du sang dans les organes soit suffisant pour apporter l’oxygène nécessaire à l’effort. Même lors de l’accélération liée à l’effort, un cœur sain continue à battre de manière synchronisée : les oreillettes et les ventricules se contractent successivement, au même rythme. Lors de certains troubles du rythme cardiaque, il peut y avoir une désynchronisation : les oreillettes battent plus vite que les ventricules.


QUELS SONT LES SYMPTÔMES DES TROUBLES DU RYTHME CARDIAQUE ? Dans la plupart des cas, les troubles du rythme cardiaque ne provoquent pas de symptômes perceptibles. Lorsqu’ils sont ressentis, ils se traduisent par une sensation de coups dans la poitrine ou d’emballement du cœur, voire de malaise avec sueurs soudaines et pâleur, pouvant aller jusqu’à une perte de connaissance temporaire, la syncope. Les palpitations ne sont pas considérées comme des troubles du rythme cardiaque au sens propre. En effet, ces accélérations fugaces du cœur sont liées à l'effet du stress ou de l'anxiété. Lorsque les troubles du rythme cardiaques sont anciens, ils fatiguent le cœur et le patient se plaint d’essoufflement à l’effort, de fatigue modérée, d’anxiété ou, parfois, de ressentir comme « un voile noir sur les yeux ». Ces symptômes ne sont pas très caractéristiques et seuls des examens complémentaires approfondis permettent de confirmer l’existence d’un trouble du rythme cardiaque.

QUELLES SONT LES COMPLICATIONS DES ARYTHMIES CARDIAQUES ? Les complications des troubles du rythme cardiaque sont de deux types : des complications cardiaques : lorsqu’elles durent et ne sont pas prises en charge, les arythmies cardiaques finissent par fatiguer le cœur. À terme, une insuffisance cardiaque peut s’installer. Elle se traduit par une incapacité du cœur à assurer sa fonction et à s’adapter aux activités quotidiennes du patient. des complications vasculaires : la mauvaise circulation du sang dans les cavités du cœur y favorise la formation de caillots. Des fragments de caillots peuvent se détacher et partir dans la circulation sanguine, provoquant des accidents vasculaires cérébraux (AVC), des troubles de la rétine ou des embolies pulmonaires (c’est ce qu’on appelle le « risque thrombo-embolique »). La prise d’anticoagulants oraux (fluidifiants sanguins) au long cours permet d’éviter ces complications.

QUELLES SONT LES CAUSES DES TROUBLES DU RYTHME CARDIAQUE ? Les arythmies cardiaques peuvent avoir de nombreuses causes. Souvent, une cause précise ne peut pas être identifiée et l’on parle alors de troubles du rythme cardiaque « idiopathiques ». Dans les autres cas, les causes des arythmies cardiaques peuvent être : l’âge ; une maladie des artères coronaires (qui apportent l’oxygène aux muscles du cœur), par exemple des dépôts de cholestérol (athérosclérose) qui diminuent leur diamètre ; les séquelles d’un infarctus du myocarde ; un mauvais fonctionnement des valves du cœur, par exemple après un rhumatisme articulaire aigu ; le stress ; la consommation excessive de substances excitantes (caféine, tabac, drogues, alcool, etc.) ; des maladies respiratoires comme l’asthme, l’œdème aigu du poumon, l’embolie pulmonaire, par exemple ; un trouble thyroïdien (hyperthyroïdie notamment) ; la prise de certains médicaments ; des troubles congénitaux ou génétiques. Peut-on prévenir les arythmies cardiaques ? La prévention des troubles du rythme cardiaque repose sur les mesures d'hygiène générale recommandées pour la santé du cœur : alimentation équilibrée, arrêt du tabac, consommation modérée d'alcool et exercice physique régulier. L'usage des substances excitantes comme le café doit rester modéré. De plus, mieux vaut éviter les drogues récréatives.

QUI SONT LES PERSONNES QUI SOUFFRENT D'ARYTHMIE CARDIAQUE ? L’arythmie cardiaque peut concerner des personnes de tout âge, à des degrés divers. Cependant, les formes pathologiques de troubles du rythme cardiaque touchent plutôt : les personnes âgées ; les personnes qui souffrent de diabète, d’obésité, d’hypertension artérielle, de troubles de la thyroïde ou d’apnée du sommeil ; les personnes qui présentent une hypokaliémie (baisse du taux de potassium dans le sang) ; les personnes qui ont une consommation excessive de substances stimulantes (caféine, tabac, drogues, alcool, etc.) ; les personnes qui souffrent de troubles cardiaques congénitaux ou acquis (par exemple, un mauvais fonctionnement des valves du cœur) ; les personnes qui prennent certains médicaments susceptibles de favoriser les torsades de pointes (notamment la quinidine, certains antibiotiques et certains neuroleptiques).

QU'APPELLE-T-ON TACHYCARDIES ? Les troubles du rythme cardiaque les plus fréquents se traduisent par une augmentation de la fréquence des battements du cœur (ou d'une partie du cœur). Ces accélérations « en salves » du rythme cardiaque, également appelées « tachycardies », peuvent être bénignes ou graves selon leur origine et leurs conséquences potentielles en termes de complications. QUAND LES OREILLETTES BATTENT TROP VITE Une accélération du rythme de contraction des oreillettes peut être observée dans divers types d’arythmies cardiaques.

LA TACHYCARDIE SINUSALE La tachycardie sinusale est proche de l’accélération du cœur produite par un effort. Le cœur se met à battre plus de 100 fois par minute, de manière synchronisée. Le plus souvent bénigne, la tachycardie sinusale peut être provoquée par un effort, le stress, la consommation excessive de substances stimulantes (café, tabac, drogues, alcool, etc.), la fièvre, certains médicaments, l’anémie, une déshydratation ou une hyperthyroïdie, par exemple. Elles ne nécessitent en général aucun traitement, sinon celui de leur cause. Une tachycardie sinusale apparaît également lors d’une crise de panique : la personne se met à transpirer, elle est pâle, son cœur s’emballe et elle a l’impression d’une mort imminente. La crise se calme spontanément en quelques minutes. Dans certains cas rares, la tachycardie sinusale est le symptôme d’une maladie plus grave, par exemple une insuffisance cardiaque ou une embolie pulmonaire (la présence d’un caillot sanguin dans une artère des poumons).

LA TACHYCARDIE SUPRAVENTRICULAIRE La tachycardie supraventriculaire se traduit par un pouls situé entre 160 et 200 battements par minute pendant quelques minutes, voire quelques heures. Elle est plutôt observée chez des personnes jeunes souffrant d’anomalies congénitales des fibres conduisant l’influx nerveux au sein du cœur (une sorte de court-circuit se crée entre les zones où se propage l’activité électrique). La maladie de Bouveret (ou tachycardie supraventriculaire paroxystique) et le syndrome de Wolff-Parkinson-White sont les formes de tachycardie supraventriculaire les plus fréquentes. Ces maladies ne font l’objet d’un traitement que si les crises de tachycardie sont invalidantes. QUAND LES VENTRICULES BATTENT TROP VITE Une accélération anormale du rythme de contraction des ventricules peut avoir de graves conséquences. Le plus souvent, une tachycardie passagère des ventricules ne produit que peu de symptômes : malaise, perte de connaissance. Mais, dans certains cas graves, l’accélération du rythme de contraction des ventricules peut provoquer une mort subite. Les troubles du rythme ventriculaires sont souvent la conséquence d’une maladie cardiaque pré-existante ou d’un infarctus du myocarde.

LE SYNDROME DU QT LONG Le QT est un segment du tracé de l’électrocardiogramme. Chez certaines personnes, ce segment est anormalement long et les ventricules battent à un rythme anormalement rapide. Le syndrome du QT long est le plus souvent dû à une anomalie génétique ou congénitale. Parfois, certains médicaments peuvent provoquer cette forme de tachycardie ou une forme voisine appelée « torsades de pointes » (voir ci-dessous).

LES TORSADES DE POINTE Les torsades de pointe sont responsables d’une accélération brève et irrégulière du rythme de contraction des ventricules (pendant quelques secondes, mais revenant régulièrement). La plupart du temps, elles ne provoquent pas de symptômes mais elles peuvent parfois être à l’origine de morts subites. Les torsades de pointe peuvent être dues : à des concentrations sanguines de potassium ou de magnésium insuffisantes, par exemple lors de diarrhées ou d’usage excessif de laxatifs stimulants ;  à un cœur trop lent ; à une mauvaise oxygénation des muscles du cœur ; à une prédisposition génétique ; à la prise de certains médicaments contre l’arythmie cardiaque, les infections bactériennes, la dépression, les troubles bipolaires, les psychoses, les troubles digestifs, etc. Leur traitement repose sur le traitement de leur cause et, éventuellement, l’administration d’un médicament pour le cœur (isoprénaline).  TACHYCARDIE VENTRICULAIRE La tachycardie ventriculaire se traduit par des battements anormalement rapides : entre 120 et 250 par minute. Le plus souvent, cette arythmie est la conséquence d’une maladie cardiaque pré-existante ou d’une cicatrice opératoire sur le cœur. Lorsqu’elle dure plus de quelques minutes, elle peut entraîner une fibrillation ventriculaire.

QU'APPELLE-T-ON BRADYCARDIES ? Habituellement, on parle de rythme cardiaque anormalement lent (également appelé « bradycardie ») lorsque celui-ci est inférieur à 50 battements par minute. Mais certaines personnes ont un rythme cardiaque lent sans en être gênées pour autant. Seules les bradycardies invalidantes (qui provoquent une fatigue anormale) ou pouvant entraîner des complications sont considérées comme pathologiques. Les causes des bradycardies sont le plus souvent une anomalie du nœud sinusal (par exemple, la présence de cicatrices dues à une autre maladie cardiaque) ou un problème de transmission de l’activité électrique entre les oreillettes et les ventricules (« bloc atrioventriculaire »). L’hypothyroïdie peut également se manifester par un ralentissement anormal du rythme cardiaque. Les bradycardies persistantes justifient la mise en place d’un stimulateur cardiaque (« pacemaker »).